CET HOMME PEINT...

Bonjour chers tous!

Il faut que je vous parle de cet homme, assis dans son cabanon, thébaïde précieuse qui lui permettait d’être seul avec lui-même, peut-être son meilleur ami ?…

Il venait là pour se détendre, penser…et peindre.

Aujourd’hui, il est venu tôt ce matin, sa femme ayant des tas de choses à faire…ailleurs.

Ca l’arrangeait dans le fond. Oh il adore sa femme, n’en doutez pas ! Mais de temps en temps se retrouver seul maître à bord, ce n’est pas désagréable, et, tout compte fait, cela fait apprécier d’autant plus son retour !

Il s’est donc préparé un thermos de café chaud, a pris sa veste doublée, et il est venu voir se lever le jour…

Assis devant cette fenêtre il regarde la campagne autour de lui, les brumes de la nuit qui fondent au soleil montant bien que la nature reste grise, mais il aime mieux cela, du moins esthétiquement parlant, que le grand soleil qui écrase et brutalise le paysage.

Là, tout est douceur, tendresse et demi-teintes.

Les verts de ce début de saison ont des subtilités de tons invraisemblables, si proches et pourtant émaillant le flanc de la colline de touches complexes et variées.

Le ciel est lui-même tout en nuances douces de gris perle et de rose tendre, fondues les unes dans les autres.

La route qui serpente au loin brille d’humidité comme un serpent sorti de l’eau…

Les fleurs sont encore fermées comme des petits poings minuscules mais déjà pleines de promesses.

Notre homme se lève et va installer son chevalet, sort ses pinceaux, ses couleurs, écrase des serpentins de pâte sur sa palette et oublie tout, le monde, son mal aux reins, le froid du matin, il peint.

Il n’est plus un homme de chair, il est devenu un outil guidé par il ne sait quelle force, juste un porte pinceau qui l’entraîne au gré de ses sens, il ne contrôle pas, il est porté, il peint…

Le soleil n’est pas sorti, mais la matinée s’est bien avancée. La toile est couverte et posant son pinceau en s’essuyant les mains dans son torchon, l’homme se lève en grinçant, ankylosé d’immobilité. Il va vers son thermos, se verse une timbale de café et, debout, appuyé sur une jambe, regarde d’un peu plus loin et de coté ce qu’il vient de terminer.

« Moui… » Mais pourtant il n’est pas satisfait. Ce n’est pas mal ! Mais c’est…Plat ? Triste ? Vide ? Il ne sait comment dire… Pourtant ce sont bien ces couleurs ! Les arbres sont bien à leur place et dans de bonnes proportions ! C’est exactement ce qu’il … VOIT…Mais pas ce qu’il ressent…

Où est cette impression de plénitude, de bonheur simple et tranquille ?

Il manque quelque chose, mais quoi ?

A ce moment les nuages s’entrouvrent et laissent filer un rai de lumière céleste. Par la petite fenêtre, un long doigt lumineux vient se poser en travers de la toile fraîche…

C’est ça !!! Oui, bien sûr, c’est exactement ça !!!!

La lumière !

Même dans un environnement de brume, il y a la lumière, et, la toile, la peinture sont opaques et ne donnent pas cette joie !

Alors l’homme avale sa dernière gorgée de café à toute vitesse au risque de s’étrangler, s’assoit sans précaution pour son dos devant son travail, prend sa palette et se prépare des mélanges savants qu’il pose à coups de brosse précise afin d’éclairer la travée révélée par le soleil déjà reparti, puis il prépare un lavis transparent et de brun roux qu’il pose enfin en glacis sur les parties d’ombre. Les verts se réchauffent, prennent de la profondeur, et la diagonale plus claire prend vie et envahit le regard du spectateur.

L’homme se rejette en arrière avec sa chaise, sans précaution au risque de basculer, pose son matériel sur la petite table à coté de lui, s’essuie les mains, tout en regardant son œuvre avec un grand sourire…

Oui, c’était bien ça…Merci lumière ! Merci la vie !!!

Tout est vie, un oiseau se perche sur le bord du mur et chante sa joie, les fleurs ouvrent enfin leur œil unique, offrant leur cœur aux papillons ; l‘homme se sent jeune, vivant, tellement vivant !

-« Chéri tu es là ?
-Oui je suis au cabanon ! Viens voir »

Mais ça…C’est une autre histoire !

Hélas, n’étant pas cet homme, je n’aurai pas d’illustration à la valeur de ce qu’il a peint ce jour-là !!! Désolée !

Mais cela ne m’empêche pas de vous souhaiter un bon dimanche à tous et de vous envoyer un flot d’amitié ensoleillée !!!

LN